61ème Rencontre du Club Sport & Management
Mardi 9 juin 2020 – Visio-conférence Zoom
« Organiser et accompagner la reprise progressive des activités sportives en appui avec des acteurs locaux, une étape-clé à réussir pour des fédérations en quête de rebond ? »
Membres présents : Mmes Anne Grospeillet-Quintin (Directrice Générale Adjointe à la FF Montagne et d’Escalade), Mélanie Leconte (Direction des sports, Ville de Versailles), Claire Rousseau (Vice-Présidente des Sports de la Région Normandie) ; MM. Patrice Behague (Directeur CREPS Poitiers), Pierre Blanc (Directeur Athling), Gianni Cappai (DTN Adjoint FF Canoë-Kayak), Cyril Cloup (Délégué général de l’ANDES), Sébastien Diot (Directeur des Pôles Jeunesse et Territoires & Compétitions et Vivre Ensemble FF BasketBall), Henri Giraud (DTN Adjoint FF Voile), Jean-Luc Habecker (DTN Adjoint FF Tennis de Table), Hervé Huet (Responsable des représentations et relations publiques de la Région Normandie), Philippe Limouzin (DTN FF Badminton) ; Thierry Mardargent (DTN FF Savate Boxe Française), Fabrice Michel-Villaz (Directeur de la Politique Commerciale, Unité Distribution Allianz France), Vincent Monnot (ancien Dirigeant Club Med Gym), Pierre-Henri Paillasson (Directeur Général FF Montagne et d’Escalade), Jean-Luc Sadik (Président de TPS Conseil)
Nous remercions l’ensemble des acteurs sportifs et territoriaux mobilisés à l’occasion de cette61ème Rencontre du Club Sport & Management. Les constats, retours et enseignements très opérationnels partagés quant aux conditions de reprise des activités, et les perspectives inquiètes de relance à partir de septembre donnent la mesure des efforts à fournir encore comme de la qualité de la coopération à renforcer entre collectivités et structures sportives.
I. Gestion de la reprise de l’activité
Si le déconfinement est effectif depuis le 11 mai, le reprise de l’activité sportive ne s’est pas déroulée de manière égale entre les disciplines : les sports outdoor ayant pu reprendre en adaptant les gestes barrière tandis que les sports de contact sont toujours interdits de pratique.
Malgré la mise en arrêt du monde sportif pendant plusieurs mois, le climat ne semble pas alarmiste pour le moment. Grâce à la sécurisation de la trésorerie et aux quelques économies faites durant le confinement, la majorité des fédérations et des clubs ne sont aujourd’hui pas en déficit financièrement.
La prudence reste cependant de mise puisqu’au contraire des clubs de haut-niveau, la lecture des difficultés des clubs amateurs reste peu précise à l’heure actuelle. Il faut prendre en compte le fait que l’évaluation réelle des dégâts dus à la crise ne peut se faire qu’en décalage dans le temps. Ainsi, les impacts plus réels se feront ressentir qu’à partir de la rentrée, de fin 2020 voire début 2021 et c’est à ce moment que les acteurs sportifs auront besoin d’aides supplémentaires.
La lourdeur des règles sanitaires imposées par le gouvernement et la complexité de leur mise en place découragent la reprise de la pratique malgré la volonté des acteurs et des pratiquants. Face à cela, certains clubs préfèrent ne pas ouvrir. Si l’on reste sur les mesures actuelles, la situation risque de devenir critique aussi bien pour le secteur marchand du sport que pour le monde fédéral.
II. Une communication INADAPTEE
L’organisation de la reprise des activités a mis en relief le décalage entre les annonces faites et la réalité du terrain, éclairant une coordination perçue comme insuffisante entre le ministère,les acteurs sportifs, les collectivités et les élus. Cette difficulté engendrant des pressions importantes sur les acteurs concernés.
La publication tardive des guides d’aide à la reprise des activités sportives sans prise en compte des propositions faites par les acteurs sportifs, leur manque de clarté laissant place à l’interprétation, l’incertitude de la question de la responsabilité face aux équipements, les effets d’annonces quant à la réouverture des équipements sportifs sans préparer les élus et les collectivités, les efforts demandés par le gouvernement bien plus importants qu’avant… Tout ceci a créé une confusion dans le monde sportif lors de la reprise.
L’Etat a donné l’impression de prendre des décisions de façon trop unilatérale. Les fédérations se sont mêmes senties livrées un peu trop à elles-mêmes privées d’un soutien qu’elles attendaient plus manifeste notamment de l’Agence Nationale du Sport.
Cette situation a renforcé l’exposition au risque et le sentiment d’incertitude face à l’avenir pour le monde sportif, alors même que la demande de pratique s’exprimait fortement tout au long de cette crise au sein de la société.
III. QUELLE offre sportive pour rebondir ?
Si aujourd’hui la première préoccupation est de rouvrir les clubs, il faut garder en tête le problème économique posé par la crise. Face à l’incertitude du lendemain quant au comportement qu’auront les licenciés à la rentrée et le maintien des mesures sanitaires contraignantes, il est nécessaire dès à présent de réfléchir à un moyen de rebondir.
Il faut garder en tête qu’il existe un contraste entre les licenciés qui pratiquent la compétition et une partie de la population qui fait de la pratique libre. Ces derniers, représentant une grosse opportunité de développement, ne trouvent pas forcément leur place dans les disciplines dont la culture est axée sur la compétition. L’enjeu est ici de convertir la demande de pratique en pratique réelle en club ou gérée par les fédérations. La déclinaison possible des offres de licences pouvant illustrer ce point.
Tout d’abord il nécessaire de se détacher de l’aspect compétitif afin de développer la pratique du loisir dans les fédérations et attirer les pratiquants libres. Déjà discuté avant la crise, le sport-santé représente un gros axe de développement pour les fédérations. Le coaching personnalisé via application ou visioconférence mérite également d’être étudié et accompagné selon les territoires. En effet, dans le cas où la reprise de la pratique se ferait au même niveau qu’avant, cela pourrait être une solution de complément pour répondre aux difficultés d’accès aux équipements saturés.
Le dispositif 2S2C intéresse également et représente un appel d’air qui pourrait permettre de relancer l’activité des clubs en tant que nouvel espace sportif. Si pour le moment les délais sont trop courts pour une mise en place efficace, l’idée d’une expérimentation préalable actuelle afin de préparer au mieux une rentrée à fort enjeu est suivie avec attention. L’intérêt serait de nouer des relations entre le monde du sport et l’école pour y inclure davantage les APS. Pour que le dispositif soit viable et n’engendre pas de confrontation entre les deux secteurs, il faudrait créer une collaboration entre les professeurs d’EPS et les éducateurs sportifs et définir clairement le statut de chacun afin de ne pas évincer l’une ou l’autre des parties concernées.
Ces axes de développement nécessitent que les ligues et les fédérations se montrent à l’écoute des pratiquants comme des élus territoriaux, pour co-construire de nouvelles réponses aménagées et mieux « marketées » (étude plus systématique de persona) plus en prise avec le local. L’idée étant de ne plus être dans une logique de menus prédéfinis mais plutôt de s’inscrire dans une logique de pratique à la carte. Cela passe par une modification du fonctionnement même de ces institutions, en privilégiant notamment un fonctionnement en mode de projet agile associant toutes les parties.
Aujourd’hui, il est nécessaire d’expérimenter de nouvelles choses ou d’adapter des solutions déjà existantes pour faire face et rebondir face aux difficultés attendues que les acteurs appréhendent. Pour cela, l’écosystème sportif devra s’ouvrir davantage, et s’appuyer sur l’aide et les initiatives menées par les autres acteurs pour innover et mettre en place des projets plus en prise avec les attentes des « clients ». Les territoires peuvent catalyser cette démarche et jouer un rôle actif de facilitateur entre les différents acteurs : ligues, clubs, collectivités, entreprises, start-ups, etc.
La qualité de la coopération qui prendra forme entre collectivités et acteurs sportifs apparaît donc comme une condition essentielle de la reprise et peut-être même de la résilience des organisations sportives.